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Infos citoyennes

09/10/16
Lettre ouverte du conseil scientifique du Parc Amazonien
à Mme Barbara Pompili, secrétaire d'Etat à la biodiversité

La Guyane, qui vous accueille aujourd’hui, est certainement un des plus importants patrimoines de l’Humanité à la fois de par sa biodiversité exceptionnelle et sa richesse culturelle. Notre territoire adossé au vaste massif Amazonien constitue un des derniers refuges de forêt tropicale humide à l’échelle globale. A ce titre l’Etat a une lourde responsabilité vis-à-vis de ces citoyens et des citoyens du monde.  

Le Sud de la Guyane, en particulier est très important sur le plan de sa biodiversité mais aussi de sa socio-diversité, avec la présence de populations autochtones et locales culturellement très riches, comme vous pourrez le constatez lors de votre mission sur la commune de Maripasoula.
 
Malheureusement, et ce, malgré le travail remarquable des agents du Parc Amazonien de Guyane, et celui réalisé par les forces armées en Guyane, le territoire du Parc Amazonien, qui devrait être un exemple en matière de protection de forêt tropicale, est impacté par des chantiers illégaux d’orpailleurs clandestins de plus en plus nombreux.

Le Conseil scientifique du Parc Amazonien a depuis longtemps alerté les autorités sur cette situation dégradante pour un Parc National, notamment avec la rédaction de cinq motions relatives à l’orpaillage illégal (30 janvier 2009, 14 octobre 2009, 12 mai 2011, 5 décembre 2012 et 7 décembre 2013). Cependant la situation ne cesse de se dégrader, comme l’atteste le dernier suivi environnemental (bulletin n°2 du PAG) des impacts de l’orpaillage illégal, qui montre une hausse de 15% (sur un an) du nombre de sites actifs, soit un total de 128 sites actifs sur le territoire du Parc amazonien. L’activité alluvionnaire qui impacte les cours d’eau n’a jamais été aussi élevée depuis 2008 avec 118 chantiers.

Cette situation est inadmissible et prouve l’aggravation de cette plaie pour notre forêt tropicale (une des mieux préservées au monde, jusqu’à il y a quelques années) et ses habitants, avec pour corollaire au pillage des ressources, un accroissement dramatique des impacts négatifs de l’orpaillage :  

-  sur la qualité des milieux pourtant extrêmement riches d'un patrimoine biologique unique (fort taux d’endémisme), dont les cours d’eau en particuliers sur de longues distances (dépôt de sédiments sur les substrats vitaux, déficits en oxygène des milieux aquatiques, élimination de la végétation aquatique...)

- sur la qualité et la quantité des ressources de subsistance (pêche, chasse, alimentation polluée...)

- sur la pollution environnementale au mercure que l’on sait à la fois d’origine naturelle, par  l'érosion  des  sols  anciens précambriens naturellement riches en  Hg, et anthropogéniques dont l'orpaillage qui favorise la lixiviation, l'érosion des sols donc la remise en suspension de la litière organique avec sa charge mercurielle. Celle-ci permet la méthylation du mercure en  methylmercure, forme hautement toxique et bioaccumulable. Nous nous permettons de rappeler l'engagement de la France quant aux directives européennes sur l'eau qui auraient dues être mises en application et opérationnelles depuis ... 2010, et dont les directives sont loin d’être mises en vigueur actuellement en Guyane…

- sur la santé des populations locales (imprégnation mercurielle...), notamment avec des intoxications massives foeto-maternelles surtout sur le Haut-Maroni : plus de 90% de la population étudiée y présente des taux supérieurs aux seuils actuels de toxicité (5µg/g de cheveux) et que plus de 15% présentent des taux sup. à 20µg dont 3 cas cliniques de neuropathies périphériques chez des adultes. Le développement psychomoteur des enfants ainsi impacté par la transmission foeto-maternelle étant grandement hypothéqué.

- sur leur mal-être croissant, mis en lumière par un taux de suicides extrêmement élevé :
un suicide sur 200 habitants sur le haut Maroni, soit 25 fois plus que celui enregistré en métropole.

- la sécurité des personnes et des biens, celle des habitants, et aussi celle des agents de sécurité de l’Etat (cf. évènements dramatiques récents tant à Maripasoula qu’à Camopi).

Les actions de police et les moyens alloués à ces actions doivent impérativement être renforcés à la hauteur du problème, et la stratégie de lutte doit être complètement repensée.  De plus, nous soulignons la nécessité d’une coopération franco-brésilienne et avec le Suriname voisin pour venir à bout de ce fléau qui entache la vision du rôle des zones protégées, en particulier celle du PAG, en décalage avec les attentes initiales  et qui donne une image dégradée et une défiance des citoyens à l'encontre de l'état régalien perçu comme
impuissant et éloigné des préoccupations premières de ces administrés. Il en va également de
l’exemplarité en matière d’environnement, à l’image de la COP21, que la France prône
vis-à-vis de pays voisins et dont les moyens étatiques   sont pourtant bien moindres que les
siens.  

De plus nous nous opposons à considérer l’extraction minière comme service écosystémique, comme cela a été mentionné dans le rapport du programme BEST (bulletin d’information BEST N° 3) établi par le WWF.  En effet, un gisement - fut-il d'origine fluviatile - relève non pas de l'écosystème (temps présent) mais du géosystème (temps long et héritage des temps anciens) qui diffère de l'écosystème par les échelles de temps et/ou par une implication du vivant révolue. L’extraction minière ne peut donc, en aucun cas, être considérée comme un service écosystémique ! Comptant sur votre soutien pour faire parvenir notre requête au plus haut niveau de l’Etat, nous vous prions, Madame la Secrétaire d’Etat, de recevoir l’expression  de nos sentiments les plus respectueux, dans l’attente d’une réaction ferme et motivée de votre part pour faire appliquer les engagements de l’Etat dans la protection de la biodiversité guyanaise et de ses habitants.

Au nom du Conseil Scientifique du Parc Amazonien de Guyane,  
Sa Présidente Marie Fleury

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