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Infos citoyennes

14/06/22
L’Ouest confronté à une «épidémie» de syphilis chez les femmes enceintes

La maladie est diagnostiquée chez 1 % des femmes venant accoucher à la maternité de Saint-Laurent du Maroni. Parmi elles, 20 cas actifs ont été repérés depuis le début de l’année. Cette infection, qui peut être traitée très facilement à condition d’être prise en charge en début de grossesse, entraîne très souvent de graves complications pour la maman et le bébé, et des morts fœtales dans 15 % des cas. Les trois hôpitaux publics viennent de s’entendre sur un protocole de prise en charge. Des pistes sont à l’étude pour le diagnostiquer le plus précocement possible.

« Les IST sont en train de flamber à nouveau : la syphilis, les chlamydiae, alors que le VIH est stable ! » C’était le 18 novembre, dans les confortables fauteuils d’un hôtel cayennais. Le Dr Gabriel Carles, tout jeune retraité du service de gynécologie-obstétrique du Chog, à qui l’on faisait se remémorer les progrès de la santé sexuelle et reproductive à Saint-Laurent du Maroni pendant ses quarante ans de carrière, déplorait quelques échecs : la fréquence des abus sexuels, les grossesses adolescentes et donc le retour de la syphilis (Lire la Lettre pro du 24 décembre).

Le sujet est suffisamment pris au sérieux pour que, il y a quinze jours, les médecins des trois hôpitaux publics de Guyane s’accordent pour tous adopter le protocole de prise en charge déjà à l’œuvre au CHOG des cas de syphilis chez les femmes enceintes. « C’est un protocole qui décrit la prise en charge de la syphilis pendant la grossesse, un sujet que nous avons beaucoup travaillé avec le Pr Olivier Picone » (AP-HP, Louis-Mourier), détaille le Dr Najeh Hcini, chef du service de gynécologie obstétrique à l’hôpital de Saint-Laurent du Maroni. Un premier article a été publié sur le sujet en mars, dans Prenatal Diagnosis.

Ce problème n’a pas surgi soudainement ces derniers mois. Sous l’impulsion du Dr Carles, l’hôpital saint-laurentais s’est spécialisé dans la surveillance et la prise en charge des maladies infectieuses chez les femmes enceintes. « Depuis 2017, nous voyions des cas sporadiques, se souvient le Dr Hcini. En 2018, ça a augmenté et en 2020, nous avons eu vraiment beaucoup de cas (11 cas actifs). C’est désormais une vraie épidémie » : 27 cas actifs l’an dernier et 20 déjà cette année. La maladie a été diagnostiquée chez plus d’une centaine de parturientes depuis 2018 au Chog. La maternité de Saint-Laurent du Maroni recense désormais 1 % de parturientes atteintes de syphilis dont « 30 à 40 formes actives par an », selon le Dr Hcini.

Si les chiffres peuvent paraître faibles comparés aux 3 300 naissances annuelles de la maternité de l’ouest, quatre points alarment les soignants :

  • Les conséquences pour la mère et pour le fœtus sont souvent catastrophiques ;
  • Le problème ne se réglera pas sans une amélioration du suivi précoce des grossesses ;
  • Ce sont des complications voire des décès in utero qui auraient pu être très facilement évités ;
  • La jeunesse des parturientes, parmi lesquelles des mineures.

« C’est une maladie extrêmement grave pour la mère et catastrophique sur le plan fœtal. Bien pire que le zika en terme de perte fœtale  », insiste le Dr Hcini. Pour la future mère, il y un risque de complication vasculaire, de complication oculaire, de neurosyphilis avec atteinte du système nerveux central. Quant au bébé à naître, « nous constatons environ 15 % de mort fœtale dans la population des femmes infectées ». C’est-à-dire que sur sept parturientes ayant la syphilis, une perdra son bébé. Si aucun traitement n’était administré, même tardivement, une sur trois perdrait son fœtus. Pour les autres, de nombreux risques demeurent pour le bébé à naître : prématurité et toutes les conséquences qu’elle peut emporter, hypotrophie, syphilis congénitale… « Si les enfants naissent vivants, ils passent déjà dix jours en néonatalogie pour le traitement. Beaucoup garderont des séquelles», souligne Léa Blondy, coordinatrice du réseau Périnat pour l’Ouest guyanais.

« Des morts fœtales qu’on aurait pu éviter »

Si les cas de syphilis chez les femmes enceintes et les conséquences pour les bébés touchent autant les soignants, c’est que « c’est une des rares fœtopathies qui peut se traiter facilement, rappelle le Dr Najeh Hcini, chef du service de gynécologie-obstétrique au Chog. On n’est pas face au zika où l’on ne peut qu’observer. Avec la syphilis, quand on a 15 pertes fœtales, on sait qu’on les aurait évitées si elle avait été traitée. On est face à une maladie pour laquelle il y a un traitement qui, s’il est fait précocement pendant la grossesse, écarte le risque à 100 %. C’est pourquoi nous, soignants, sommes touchés par cette maladie. »

Ce traitement, ce sont souvent deux injections intramusculaires de 2,4 millions d’unités de benzathine pénicilline G « retard », prises à une semaine d’intervalle. « Deux piqûres de pénicilline dans les fesses et ça disparaît ! », résume Léa Blondy, coordinatrice du réseau Périnat pour l’Ouest guyanais. Mais celles-ci doivent être réalisées en début de grossesse. « A partir de 18 semaines d’aménorrhée (peut-être 16 même, NDLR), la syphilis passe la barrière placentaire et peut infecter le fœtus », poursuit Léa Blondy. Avec les conséquences évoquées ci-dessus.

Les cas de syphilis sont donc généralement diagnostiqués chez des femmes non suivies pendant leur grossesse, à un stade avancé de la maladie. Tout l’enjeu est donc de la repérer au plus tôt, de préférence pendant le premier trimestre. « Si on avait des suivis de grossesse dès le premier trimestre avec analyse de sang, nous aurions des cas de syphilis, mais pas leurs conséquences, insiste le Dr Hcini. Quand on est enceinte, on va voir précocement un professionnel de santé ; il demandera les analyses de grossesse. Si la maladie est là, il le saura. Il ne pourra pas passer à côté. Et quand on est traitée, on ne l’est que si le conjoint se traite aussi. »

Des discussions sont déjà entamées entre l’ARS, le réseau Périnat, la Croix-Rouge française, le CHOG et les centres gratuits d’information, de dépistage et de diagnostic (Cegidd). L’une des pistes est le déploiement de tests rapides d’orientation diagnostique (Trod) combinés VIH-Syphilis, réalisés par les sages-femmes libérales. « Il faut aussi faire beaucoup de sensibilisation, insiste Léa Blondy. Quand on les interroge sur les IST, les jeunes nous citent toujours le VIH. Et même à ce sujet, quand on leur demande ce que c’est, ils ne savent pas grand-chose. »

Une maladie non immunisante

L’une des difficultés à laquelle font face les soignants de l’ouest guyanais pour affronter l’épidémie de syphilis tient à son caractère non immunisant : à la différence de la varicelle, de chacun des sérotypes de la dengue ou, dans une moindre mesure, du Covid-19, « on attrape la syphilis autant de fois qu’on est exposé, résume le Dr Najeh Hcini, chef du service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital de Saint-Laurent du Maroni. Donc nous traitons la femme ; elle retourne vers son conjoint et, s’il n’a pas été traité de manière efficace, on tombe dans une boucle contaminante. »

A Saint-Laurent du Maroni, 100 % des femmes enceintes chez qui est diagnostiquée la syphilis acceptent le traitement. « C’est le premier stade. Ensuite, il faut traiter le conjoint. Nous ne sommes pas arrivés, et pour plusieurs raisons, à dépister et traiter tous les conjoints », regrette le Dr Hcini. Pourtant, chez les hommes aussi, la syphilis peut avoir des conséquences lourdes : des lésions au point d’entrée de la bactérie (organes génitaux, anus, amygdales…) en général trois semaines après la contamination jusqu’à des atteintes cardiovasculaires, nerveuses, articulaires, et touche tous les organes parfois plusieurs années après chez les patients non traités. Elle augmente aussi le risque de transmission du VIH.

« En outre, la maladie s’exprime de manière différente selon les patientes, poursuit le Dr Hcini. Quelle que soit la phase de la maladie, elle peut contaminer son futur bébé. La maladie peut rester sous forme latente chez la femme et que le bébé ait toutes les complications jusqu’à la mort fœtale. » Il suggère donc mener des actions à l’échelle de la population, avec des opérations de dépistage de la syphilis.

Cet article est issu de la Lettre pro de l’Agence régionale de santé. Vous pouvez vous y abonner en remplissant le formulaire suivant : https://forms.sbc28.com/5a8bed50b85b5350ef1cd117/t13M7zUZQi2XMq5E3DdnhQ/0WQoeDwjRXqJblCpKbLDzA/form.html  


The disease is diagnosed in 1% of women giving birth at the Saint-Laurent du Maroni maternity ward. Among them, 20 active cases have been identified since the beginning of the year. This infection, which can be treated very easily provided it is taken care of at the start of pregnancy, very often leads to serious complications for the mother and the baby, and fetal death in 15% of cases. The three public hospitals have just agreed on a treatment protocol. Ways are being studied to diagnose it as early as possible.

“STIs are on the rise again: syphilis, chlamydia, while HIV is stable! It was November 18, in the comfortable armchairs of a hotel in Cayen. Dr. Gabriel Carles, a very young retiree from the gynecology-obstetrics department of the Chog, who was reminded of the progress of sexual and reproductive health in Saint-Laurent du Maroni during his forty-year career, lamented a few failures: the frequency of sexual abuse, teenage pregnancies and therefore the return of syphilis (Read the Professional Letter of December 24).

The subject is taken seriously enough that, a fortnight ago, the doctors of the three public hospitals in French Guiana agreed to all adopt the management protocol already at work at CHOG for cases of syphilis in women. pregnant. "It's a protocol that describes the management of syphilis during pregnancy, a subject that we have worked on a lot with Professor Olivier Picone" (AP-HP, Louis-Mourier), explains Dr Najeh Hcini, head of the obstetrics gynecology department at Saint-Laurent du Maroni hospital. A first article was published on the subject in March, in Prenatal Diagnosis.

This problem has not suddenly arisen in recent months. Under the leadership of Dr. Carles, the Saint-Laurent hospital has specialized in the monitoring and management of infectious diseases in pregnant women. "Since 2017, we have been seeing sporadic cases," recalls Dr. Hcini. In 2018, it increased and in 2020, we had a lot of cases (11 active cases). It is now a real epidemic ”: 27 active cases last year and 20 already this year. The disease has been diagnosed in more than a hundred parturients since 2018 at the Chog. The Saint-Laurent du Maroni maternity hospital now lists 1% of parturients suffering from syphilis, including "30 to 40 active forms per year", according to Dr. Hcini.

If the figures may seem low compared to the 3,300 annual births of the western maternity ward, four points alarm caregivers:

  • The consequences for the mother and the fetus are often catastrophic;
  • The problem will not be resolved without an improvement in the early monitoring of pregnancies;
  • These are complications or even deaths in utero that could have been very easily avoided;
  • The youth of parturients, including minors.

“It is an extremely serious disease for the mother and catastrophic for the fetus. Much worse than zika in terms of fetal loss,” insists Dr. Hcini. For the future mother, there is a risk of vascular complication, ocular complication, neurosyphilis with damage to the central nervous system. As for the unborn baby, "we see about 15% fetal death in the population of infected women". That is to say that out of seven parturients with syphilis, one will lose her baby. If no treatment was given, even late, one in three would lose their fetus. For the others, many risks remain for the unborn baby: prematurity and all the consequences it can have, hypotrophy, congenital syphilis... “If the children are born alive, they already spend ten days in neonatology for the treatment. Many will have consequences, ”said Léa Blondy, coordinator of the Périnat network for western Guyana.

"Preventable fetal deaths"

If cases of syphilis in pregnant women and the consequences for babies affect caregivers so much, it is because "it is one of the rare fetopathies that can be treated easily, recalls Dr. Najeh Hcini, head of the gynecology department- obstetrics at the Chog. We are not facing zika where we can only observe. With syphilis, when you have 15 fetal losses, you know that you would have avoided them if it had been treated. We are facing a disease for which there is a treatment which, if done early during pregnancy, eliminates the risk to 100%. This is why we, caregivers, are affected by this disease. »

This treatment often consists of two intramuscular injections of 2.4 million units of benzathine penicillin G "depot", taken one week apart. “Two penicillin injections in the buttocks and it disappears! sums up Léa Blondy, coordinator of the Périnat network for western French Guiana. But these must be done in early pregnancy. "From 18 weeks of amenorrhea (perhaps even 16, editor's note), syphilis crosses the placental barrier and can infect the fetus", continues Léa Blondy. With the consequences mentioned above.

Cases of syphilis are therefore generally diagnosed in women who were not followed during their pregnancy, at an advanced stage of the disease. The challenge is therefore to spot it as soon as possible, preferably during the first trimester. “If we had pregnancy follow-ups from the first trimester with blood analysis, we would have cases of syphilis, but not their consequences, insists Dr. Hcini. When you are pregnant, you go to see a health professional early; he will ask for the pregnancy analyses. If the disease is there, he will know it. He can't pass it by. And when you are treated, you are only treated if the spouse is also treated. »

Discussions have already begun between the ARS, the Périnat network, the French Red Cross, the CHOG and the free information, screening and diagnosis centers (Cegidd). One of the avenues is the deployment of rapid diagnostic orientation tests (Trod) combined HIV-Syphilis, carried out by private midwives. “We also need to do a lot of awareness-raising, insists Léa Blondy. When we ask them about STIs, young people always mention HIV. And even about that, when you ask them what it is, they don't know much. »

A non-immune disease

One of the difficulties faced by caregivers in western French Guiana in tackling the syphilis epidemic is its non-immunizing nature: unlike chickenpox, each of the dengue fever serotypes or, to a lesser extent , of Covid-19, “we catch syphilis as many times as we are exposed, summarizes Dr Najeh Hcini, head of the gynecology-obstetrics department at the Saint-Laurent du Maroni hospital. So we treat the woman; she returns to her spouse and, if he has not been treated effectively, we fall into a contaminating loop. »

In Saint-Laurent du Maroni, 100% of pregnant women diagnosed with syphilis accept treatment. “This is the first stage. Then you have to deal with the spouse. We did not manage, and for several reasons, to detect and treat all the spouses”, regrets Dr. Hcini. However, in men too, syphilis can have serious consequences: lesions at the point of entry of the bacteria (genital organs, anus, tonsils, etc.) generally three weeks after contamination, up to cardiovascular, nervous, joints, and affects all organs sometimes several years later in untreated patients. It also increases the risk of HIV transmission.

“In addition, the disease is expressed differently in different patients,” continues Dr. Hcini. Whatever the phase of the disease, she can contaminate her future baby. The disease can remain in a latent form in the woman, and the baby has all the complications until fetal death. He therefore suggests carrying out actions on a population scale, with screening operations for syphilis.

This article is from the Regional Health Agency's Newsletter. You can subscribe by filling out the following form: https://forms.sbc28.com/5a8bed50b85b5350ef1cd117/t13M7zUZQi2XMq5E3DdnhQ/0WQoeDwjRXqJblCpKbLDzA/form.html
 

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