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Infos citoyennes

05/07/22
Crise des urgences : « Des mesures de bon sens mais difficilement applicables en Guyane »

Le Dr François Braun, nommé hier à la tête du ministère de la Santé, avait rendu vendredi les 41 recommandations de la mission flash sur les urgences et soins non programmés. Un rapport qui doit permettre aux services d’urgences en difficulté, comme c’est le cas à Saint-Laurent du Maroni, de prendre en charge au mieux les patients pendant la période des grandes vacances. Le Pr Jean Pujo, chef des urgences – Samu à l’hôpital de Cayenne, s’est penché sur les mesures pour voir lesquelles pourraient être mises en œuvre en Guyane.



« La crise que vivent actuellement les services d’urgence n’est que la partie émergée d’une crise structurelle plus profonde qui touche l’ensemble de la réponse aux besoins de soins urgents et de soins non programmés et plus largement l’ensemble de notre système de santé. Acutisée par des pénuries de personnels médicaux et non médicaux au sein de l’hôpital, conséquence indirecte de la pandémie de Covid-19, cette crise atteint des proportions qui peuvent mettre en danger dès cet été la permanence et la continuité des soins. D’autant qu’au-delà des difficultés mentionnées et des risques habituels liés à la période estivale, on assiste à la reprise des contaminations par le coronavirus. »

Trois jours avant d’être nommé ministre de la Santé et de la Prévention, le Dr François Braun, alors président de Samu – Urgences de France, rendait les conclusions de la mission flash sur les urgences et les soins non programmés.  L’objectif : proposer des solutions immédiates aux difficultés que rencontrent de nombreux services d’urgences à l’orée des grandes vacances. En Guyane, le centre hospitalier de l’ouest guyanais (Chog, lire la Lettre pro de vendredi), est le plus en difficulté. Depuis la semaine dernière, il régule l’accès des patients la nuit.

François Braun : « Quelqu’un de consensuel et à l’écoute » : Hier après-midi, le Pr Jean Pujo, chef du service urgences – Samu à l’hôpital de Cayenne, se disait « très content que ce soit quelqu’un des urgences » qui ait été nommé ministre, « quelqu’un de consensuel, à l’écoute (…) C’est un bon choix. Il est plein de bon sens et connaît bien le terrain. » Ces deux dernières années, les deux praticiens ont eu l’occasion d’échanger : depuis le début de la crise sanitaire, François Braun coprésidait les réunions des Samu zonaux qui ont par exemple permis la réalisation des évacuations sanitaires stratégiques (Stratévac) entre la Guyane et les Antilles. Le chef des Urgences – Samu a lu le rapport Braun. Hier, il en discutait avec le Pr Karim Tazarourte, l’un de ses co-auteurs, qui vient depuis de nombreuses années en Guyane pour des formations. « Il y a des mesures classiques et évidentes. Applicables partout en France, elles le sont difficilement chez nous, pour la plupart. Il y a un principe de solidarité, d’entraide. Mais en Guyane, on est tout seul. On ne peut pas faire venir les gens comme ça ! Les médecins généralistes sont déjà peu nombreux. Les urgentistes sont déjà au maximum de leur temps de travail. Toutes les mesures incitatives n’auront, à mon avis, que peu d’impact sur notre organisation générale. »

« Ne pas venir aux urgences n’importe quand » : « Pour moi, parmi les mesures applicables : peut-être inciter certains généralistes, sur le mode du volontariat, à venir faire de la permanence des soins ou renforcer la maison médicale de garde. Un médecin à la maison médicale, ce n’est pas suffisant. Faciliter les recrutements. C’est trop tôt pour réfléchir à la délégation de compétence avec les infirmiers ; ils ne sont pas encore formés pour ça. Mais le contenu de ce rapport servira pour l’avenir (…) On incite aussi la population à être raisonnable, à ne pas venir n’importe quand, à maintenir une relation qui soit correcte avec les personnels. L’attente crée de l’agressivité, de l’incompréhension. Un service d’urgence n’est pas le recours à tous les maux d’un système de santé qui n’est pas tout à fait performant. »

« Il y a peu de médecins généralistes et ils sont au taquet » : « On a affaire à des populations particulières, qui n’ont pas forcément les moyens de se rendre à la maison médicale de garde parce que tout n’est pas pris en charge. Ils arrivent aux urgences alors que ce ne sont pas forcément des urgences. » « Les mesures incitatives comme le forfait patient urgences (un montant de 19,61 euros à régler par le patient si son passage aux urgences n’est pas suivi d’une hospitalisation), on n’en a pas vu l’impact. Les gens viennent. Si notre activité le permet, on les reçoit. Si on les réoriente, ça donne lieu à des conflits parce que les gens ne comprennent pas qu’on priorise les urgences et qu’en journée, il serait licite de s’adresser à un médecin généraliste. Mais comment s’adresser à un médecin généraliste ? Il y en a peu ; ils sont au taquet ; à certains endroits, il faut prendre un ticket à 4 heures du matin. Notre environnement ne nous permet pas d’appliquer certaines mesures qui sont proposées. »

« Certains hôpitaux offrent des ponts d’or » : « Avec le nouveau système Padhue, on n’a plus la possibilité d’embaucher les médecins directement (Après publication des postes qui leur sont ouverts, une commission, avec des professionnels de santé, sélectionne les praticiens à diplôme hors Union européenne qui peuvent être recrutés par les établissements). L’an dernier, sur 50 candidats, 15 étaient recevables, se souvient le Pr Pujo. Les autres n’avaient pas les formations ni l’expérience nécessaires mais ont tenté. Sur les 15, on a reposé des questions et on en a sélectionné cinq. Et sur les cinq, un est venu et il repart. On a un turn over. Tous les services d’urgences sont en pénurie totale. Il y a une concurrence. Certains hôpitaux offrent des ponts d’or et ces praticiens sont moins enclins à venir en Guyane. Nous ne sommes plus aussi attractifs puisque nous ne sommes plus les seuls à pouvoir leur donner une qualification. On a matière à recruter, mais on n’y arrive pas. Il nous faut pouvoir être plus réactifs. »

« Mes médecins sont à 60 heures » : « Faire preuve de solidarité ? Majorer les heures supplémentaires ? Nous sommes déjà au maximum d’heures. A chaque grandes vacances, mes médecins sont à 60 heures par semaine. Ces mesures incitatives, c’est possible quand il y a de la marge. En Guyane, ce n’est pas possible. Ce n’est pas une question de volonté. Les soignants sont déjà en heures supplémentaires et il y a une limite physique. Travailler avec les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ? Il n’y en a pas encore en Guyane (elle est en cours de création, NDLR). Ces recommandations, quelque part, ne nous concerne pas (…) Fluidifier les parcours ? Quand les hôpitaux sont plein, qu’on ne peut pas hospitaliser, qu’il n’y a pas d’aval de l’aigu, qu’il n’y a pas de transport des patients au retour à domicile, tout ça, ça bloque le système. Dans l’Hexagone, on peut s’organiser avec les voisins et il y a beaucoup de médecins. »

« On commence à mettre en place des médecins correspondants Samu » : « Les médecins correspondants Samu, on commence à le mettre en place. L’ARS nous a octroyé des fonds. Mais ça ne peut être que des médecins-pompiers, des médecins des CDPS et rarement des médecins généralistes parce qu’ils n’ont pas le temps. On ne peut pas demander à un médecin généraliste de quitter son cabinet pour une urgence. Maripasoula, Saint-Georges et Grand-Santi comptent pour 85 % des urgences qui nous arrivent des CDPS. Donc nous misons sur le fait d’y mettre des urgentistes. On a embauché une dizaine de médecins ; notre Cesu (centre d’enseignement des soins d’urgence) les forme ; on met en place un diplôme universitaire d’initiation à la médecine d’urgence. On commence à le faire à Maripasoula, en espérant pouvoir le faire pour les deux autres en 2023. »

« Les outils de télémédecine sont là » : « On peut faire de la télé-assistance et de la téléconsultation. On utilise ça dans la régulation et on commence à l’utiliser avec les CDPS. On a équipé le Chog et les CDPS de Grand-Santi, Saint-Georges et Maripasoula de lunettes connectées qui nous permettent de voir les patients. On l’utilise aussi parfois lors d’évacuation sanitaire transatlantique, lorsque le patient ne va pas très bien, pour garder le contact avec l’équipe de soignants. C’est un système financé par l’ARS. Les outils de télémédecine sont là. Encore faut-il qu’on ait le réseau ! »

« Aux urgences de Cayenne, ça reste gérable »

Avec 50 000 passages par an, les urgences de Cayenne sont les plus importantes du territoire. Alors que l’hôpital de Saint-Laurent du Maroni doit réguler ses urgences la nuit pendant les grandes vacances, faute d’infirmiers, le CHC est dans une situation différente : « Aux urgences de Cayenne, nous ne sommes pas en pénurie de soignants, insiste le Pr Jean Pujo. Bien sûr, les personnels ont besoin de vacances parce que les deux dernières années ont été particulièrement compliquées. Cela nous oblige à faire plus d’efforts mais c’est propre aux services d’urgences où, lors des grandes vacances, des gens partent. Nous avons suffisamment de personnel pour maintenir la présence d’un urgentiste à Maripasoula H24. Nous ne sommes pas dans la situation de beaucoup de services d’urgences métropolitains. Mais il ne faut pas qu’on ait d’arrêt maladie ; il ne faut pas qu’on ait une épidémie terrible qui nous tombe sur le nez ; il ne faut pas que les gens décident de tous venir en même temps aux urgences de Cayenne. Il ne faudrait pas qu’on ait une vague de soignants malades comme l’année dernière parce qu’on ne pourra faire appel à personne : ni au Chog, ni à Kourou, ni aux intérimaires. Si les choses se dégradent comme au Chog, il faudra réguler les entrées. Il y a des gens qui n’ont rien à faire dans un service d’urgences mais qui n’ont pas d’autres solutions. Au milieu d’un infarctus et d’un accident, il faut réguler J’ai mal aux oreilles. Ça prend du temps alors que nous n’avons pas des effectifs extensibles. C’est de la qualité en moins. On est à fil tendu mais ça reste gérable. A condition d’avoir des lits d’aval. Je ne veux pas que les patients restent un, deux, trois jours aux urgences faute d’avoir de la place dans les services. »

Cet article est issu de la Lettre pro de l’Agence régionale de santé. Vous pouvez vous y abonner en remplissant le formulaire suivant : https://forms.sbc28.com/5a8bed50b85b5350ef1cd117/t13M7zUZQi2XMq5E3DdnhQ/0WQoeDwjRXqJblCpKbLDzA/form.html  
 


Dr. François Braun, appointed yesterday at the head of the Ministry of Health, had made Friday the 41 recommendations of the flash mission on emergencies and unscheduled care. A report which should allow emergency services in difficulty, as is the case in Saint-Laurent du Maroni, to take care of patients as well as possible during the long holiday period. Professor Jean Pujo, head of emergencies – Samu at Cayenne hospital, looked at the measures to see which ones could be implemented in French Guiana.



“The crisis that the emergency services are currently experiencing is only the visible part of a deeper structural crisis which affects the entire response to urgent care needs and unscheduled care and, more broadly, the whole of our health system. Sharpened by shortages of medical and non-medical staff within the hospital, an indirect consequence of the Covid-19 pandemic, this crisis is reaching proportions that could endanger the permanence and continuity of care this summer. Especially since beyond the difficulties mentioned and the usual risks associated with the summer period, we are witnessing the resumption of contamination by the coronavirus. »

Three days before being appointed Minister of Health and Prevention, Dr. François Braun, then president of Samu – Urgences de France, delivered the conclusions of the flash mission on emergencies and unscheduled care. The objective: to offer immediate solutions to the difficulties encountered by many emergency services on the eve of the summer holidays. In French Guiana, the hospital center in western French Guiana (Chog, read Friday's Professional Letter), is the most in difficulty. Since last week, he has been regulating patient access at night.

François Braun: "Someone consensual and attentive": Yesterday afternoon, Professor Jean Pujo, head of the emergency department - Samu at the Cayenne hospital, said he was "very happy that it was someone emergencies” who was appointed minister, “someone consensual, attentive (…) It is a good choice. He is full of common sense and knows the terrain well. Over the past two years, the two practitioners have had the opportunity to discuss: since the beginning of the health crisis, François Braun co-chaired the meetings of the zonal Samu which, for example, enabled the carrying out of strategic medical evacuations (Stratevac) between the French Guiana and the West Indies. Chief of ER - Samu read the Braun report. Yesterday, he was discussing it with Professor Karim Tazarourte, one of his co-authors, who has been coming to French Guiana for many years for training. “There are classic and obvious measures. Applicable everywhere in France, they are difficult for us, for the most part. There is a principle of solidarity, of mutual aid. But in French Guyana, we are all alone. We can't bring people like that! General practitioners are already few in number. The emergency workers are already at their maximum working hours. All the incentives will, in my opinion, have little impact on our general organization. »

"Do not come to the emergency room at any time": "For me, among the applicable measures: perhaps encourage certain general practitioners, on a voluntary basis, to come and provide permanent care or reinforce the medical center on duty. A doctor at the medical center is not enough. Facilitate recruitment. It is too early to reflect on the delegation of competence with the nurses; they are not yet trained for that. But the content of this report will be used for the future (…) We also encourage the population to be reasonable, not to come at any time, to maintain a good relationship with the staff. Waiting creates aggression, incomprehension. An emergency service is not the recourse to all the evils of a health system that is not quite efficient. »

"There are few general practitioners and they are on the job": "We are dealing with special populations, who do not necessarily have the means to go to the medical center on duty because not everything is taken into charge. They arrive at the emergency room when it is not necessarily an emergency room. “Incentive measures such as the emergency patient package (an amount of 19.61 euros to be paid by the patient if his visit to the emergency room is not followed by hospitalization), we have not seen the impact. People come. If our activity allows it, we receive them. If we redirect them, it gives rise to conflicts because people do not understand that we prioritize emergencies and that during the day, it would be legitimate to go to a general practitioner. But how do you contact a general practitioner? There are few; they are at the cleat; in some places you have to take a ticket at 4am. Our environment does not allow us to apply certain measures that are proposed. »

"Some hospitals offer gold bridges": "With the new Padhue system, we no longer have the possibility of hiring doctors directly (After publication of the positions open to them, a commission, with health professionals, selects practitioners with a diploma from outside the European Union who can be recruited by the establishments). Last year, out of 50 candidates, 15 were admissible, remembers Professor Pujo. The others did not have the necessary training or experience but tried. Of the 15, we asked questions and we selected five. And of the five, one has come and is leaving. We have a turnover. All emergency services are in total shortage. There is competition. Some hospitals offer gold bridges and these practitioners are less inclined to come to French Guiana. We are no longer as attractive since we are no longer the only ones who can give them a qualification. We have plenty to recruit, but we can't. We need to be able to be more responsive. »

“My doctors are at 60 hours”: “Show solidarity? Increase overtime? We are already at the maximum of hours. Every major vacation, my doctors work 60 hours a week. These incentives are possible when there is room. In French Guyana, this is not possible. It is not a question of will. Caregivers are already on overtime and there is a physical limit. Working with professional territorial health communities (CPTS)? There is not yet in French Guyana (it is being created, editor's note). These recommendations, somewhere, do not concern us (…) Make the routes more fluid? When the hospitals are full, when we cannot hospitalize, when there is no downstream of the acute, when there is no transport of patients on their way home, all that, it blocks the system. In France, we can organize with the neighbors and there are many doctors. »

“We are starting to set up Samu corresponding doctors”: “The Samu corresponding doctors, we are starting to set it up. The ARS granted us funds. But it can only be firefighters, CDPS doctors and rarely general practitioners because they don't have the time. A general practitioner cannot be asked to leave his practice for an emergency. Maripasoula, Saint-Georges and Grand-Santi account for 85% of the emergencies that come to us from CDPS. So we are betting on putting emergency workers there. We hired about ten doctors; our Cesu (emergency care education center) trains them; we set up a university diploma of initiation to emergency medicine. We are starting to do it in Maripasoula, hoping to be able to do it for the other two in 2023.”

“The telemedicine tools are there”: “We can do tele-assistance and tele-consultation. We use this in regulation and we are starting to use it with CDPS. We have equipped the Chog and the CDPS of Grand-Santi, Saint-Georges and Maripasoula with connected glasses that allow us to see the patients. It is also sometimes used during transatlantic medical evacuation, when the patient is not doing very well, to keep in touch with the medical team. It is a system financed by the ARS. The telemedicine tools are there. We still need to have the network! »

“In the Cayenne emergency room, it remains manageable”

With 50,000 visits per year, Cayenne emergencies are the most important in the territory. While the Saint-Laurent du Maroni hospital has to regulate its emergencies at night during the summer holidays, due to a lack of nurses, the CHC is in a different situation: "In the Cayenne emergency room, we are not short of caregivers, insists Professor Jean Pujo. Of course, the staff need a vacation because the last two years have been particularly complicated. This forces us to make more efforts but it is specific to emergency services where, during the long holidays, people leave. We have enough staff to maintain the presence of an emergency doctor in Maripasoula H24. We are not in the situation of many metropolitan emergency services. But we must not have sick leave; we must not have a terrible epidemic falling on our noses; people must not all decide to come to the Cayenne emergency room at the same time. We shouldn't have a wave of sick caregivers like last year because we won't be able to call on anyone: neither the Chog, nor Kourou, nor the temporary workers. If things deteriorate like at the Chog, the entries will have to be regulated. There are people who have nothing to do in an emergency department but who have no other solutions. In the midst of a heart attack and an accident, you have to regulate My ears hurt. It takes time when we do not have an expandable workforce. It's less quality. We are tight but it remains manageable. Provided you have downstream beds. I do not want patients to stay one, two, three days in the emergency room for lack of space in the departments. »

This article is from the Regional Health Agency's Newsletter. You can subscribe by filling out the following form: https://forms.sbc28.com/5a8bed50b85b5350ef1cd117/t13M7zUZQi2XMq5E3DdnhQ/0WQoeDwjRXqJblCpKbLDzA/form.html
 

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