Le DSRC Onco Guyane a organisé son deuxième colloque, consacré au lien ville-hôpital, jeudi dernier. Les intervenants ont fait le point sur plusieurs dispositifs et chantiers en cours dans cette spécialité, qui s’est fixé comme objectif de traiter 80 % des cancers sur le territoire d’ici à 2030.
S’il est un observateur avisé de l’évolution de la prise en charge des cancers en Guyane, c’est le Dr Laurent Dejault. Depuis dix ans, le médecin généraliste de Matoury préside Onco Guyane, le dispositif spécifique régional en cancérologie (DSRC). « Les choses évoluent. Le réseau grandit. Les acteurs sont identifiés. Il y a une maturation de la prise en charge des patients atteints de cancer en Guyane, même s’il demeure des faiblesses. L’autonomisation de la Guyane est légitime et sera la bienvenue. Cette évolution, c’est grâce au travail de tout un chacun dans cette salle. » Ce constat, le médecin l’a dressé jeudi matin, devant les participants au séminaire d’Onco Guyane sur le lien ville hôpital. Pour l’occasion étaient réunis des professionnels de santé hospitaliers et libéraux, des associations de patients, l’ARS, le GCS Guyasis…
Médecine nucléaire, radiothérapie…
Ces progrès, le Dr Pierre Charestan, conseiller médical auprès du directeur général de l’ARS, en a cité quelques-uns : « L’arrivée du Dr Pétorin comme oncologue à plein temps sur le territoire (…) la création du centre de coordination en cancérologie, présidé par le Pr Ravery (lire la Lettre pro du 3 mars 2023), le renforcement des équipes mobiles de soins palliatifs adultes et pédiatriques (…), le dossier numérique commun en cancérologie en cours de réalisation, la création de l’annuaire de soins de support. »
Plusieurs évolutions sont encore attendues. Début mars, l’ARS a ouvert deux fenêtres de dépôt des demandes d’autorisation, dont la médecine nucléaire et le traitement des cancers. Ces fenêtres rendent possible l’installation de la radiothérapie, d’un TEP-scan et de la scintigraphie sur le territoire (lire la Lettre pro du 7 février). Parmi les autres évolutions envisageables, l’autonomisation de la Guyane pour l’instauration des chimiothérapies et la conduite des réunions de concertation pluridisciplinaire.
Annuaire, conciergerie, formations…
« Le parcours en cancérologie est d’une grande complexité et mobilise une multitude d’acteurs et de dispositifs », reconnaît le Dr Charestan. Onco Guyane a, dans ses missions, le renforcement de la lisibilité des parcours, comme le rappelle Cora Charles, sa directrice coordinatrice. Outre l’annuaire des soins de support en oncologie, mis à jour l’an dernier, le DSCR travaille sur les sujets d’oncopédiatrie, les carnets de liaison, le dossier communiquant de cancérologie (DCC) et le déploiement de la feuille de route Cancer. Une conciergerie administrative verra le jour à la fin du mois (lire ci-dessous). Onco Guyane réalise également des enquêtes auprès des patients sur la qualité des prises en charge et des formations pour les professionnels. La prochaine aura lieu les 5 et 6 juin sur l’accueil et la prise en charge des patientes atteintes de cancer du sein (inscriptions closes).
Lors du séminaire, le Dr Charestan a remercié les acteurs pour leur « engagement » et leur « implication sans faille pour améliorer le parcours du patient atteint de cancer ». Il les a assurés du « total soutien de l’Agence régionale de santé pour vous aider à réaliser vos missions. Le chemin à parcourir est long et nous devons franchir de nombreux obstacles, continuons à œuvrer collectivement pour atteindre des objectifs ambitieux de qualité et d’excellence. »
IPA en oncologie : « Elles nous soulagent énormément »
Depuis la fin 2024, le Centre Hospitalier de l’Ouest guyanais (Chog) dispose d’une infirmière de pratique avancée (IPA) en oncologie, Karen Vanderspeeten. Il s’agit de la seconde sur le territoire, après Gaëlle Saintomer, qui occupe cette fonction depuis 2021 au Centre Hospitalier de Cayenne.
« Avec l'activité d'IPA, j’ai un versant très clinique tout en gardant une partie de coordination, puisque j’ai exercé la fonction d’Idec (infirmier de coordination) pendant onze ans en soins palliatifs, explique Gaëlle Saintomer. Les IPA peuvent en effet prescrire des examens, et renouveler et adapter les traitements, « avec la responsabilité qui va avec », souligne Gaëlle Saintomer.
« J’interviens à plusieurs étapes du parcours des patients, détaille Gaëlle Saintomer. J’assure le premier recours pour les patients qui ont des symptômes d’inconfort et adressés par des médecins généralistes ou les urgences. Je revois les patients pendant leur traitement. Je réalise des consultations de suivi en soins palliatifs, en soins de support et pour les thérapies ciblées orales (TCO), ainsi que les parcours Sein avec suivi clinique et mammographie. » L'IPA propose également une consultation spécifique « SOS symptômes pour les patients pris en soins en oncologie, qui présentent des symptômes plus ou moins aigus et qui ont besoin d’être bilantés ». En outre, elle réalise des formations aux élèves infirmiers et à ses pairs, et participe aux réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP).
L’IPA a également un rôle de coordination soignante avec l’extérieur de l’hôpital : « Les médecins et infirmiers libéraux, les cliniques, les autres établissements, en Guyane et hors de Guyane », liste-t-elle. C’est ainsi elle qui répond à la ligne dédiée aux professionnels de santé et au numéro d’urgence pour les patients.
« Cela permet de dégager du temps médical pour des consultations plus complexes et des avis dans les services », constate-t-elle. Le Dr Caroline Pétorin, cheffe de service d’oncologie au CHC, abonde : « Cela nous soulage énormément. Leur travail a à la fois un aspect médical supervisé par un médecin et de la coordination. Aujourd’hui, les chimiothérapies orales sont généralement déléguées aux IPA. En gérant les relations entre la ville et l’hôpital, en répondant aux appels des patients, cela nous enlève une importante charge de travail. » Le Dr Pétorin souligne également l’intérêt des consultations de reprise d’annonce : « Le médecin annonce le diagnostic, le traitement. L’infirmier de pratique avancée va reprendre avec le patient tout ce qui a été dit, fera le point avec lui sur ce qu’il a retenu, ce qu’il a compris, et fera également le point sur les soins de support. »
La cheffe de service a déjà mesuré les bénéfices d’une IPA : « Dans mon ancien hôpital, où je travaillais déjà avec une IPA, nous avions constaté une diminution des durées d’hospitalisation et un moindre recours de ces patients aux urgences. »
Au CHC, davantage de place pour l’oncologie
Depuis le mois d’octobre, l’hôpital de jour d’oncologie est installé dans des bungalows, au CHC. Ses anciens locaux étaient trop étroits. En travaux, ils doivent accueillir la réanimation pédiatrique. Dans les bungalows, le nombre de lits et de places a été augmenté à cinq (trois chambres simples et une double) et dix, contre quatre et huit « en poussant les murs » des anciens locaux, se réjouit le Dr Caroline Pétorin, cheffe de service. Les médecins disposent désormais de bureaux individuels, en lieu et place de leur ancien open space. A terme, le service doit rejoindre le futur bâtiment ambulatoire du CHC.
Une conciergerie administrative attendue à la fin du mois
Fluidifier le parcours administratif des patients souffrant de cancer, notamment ceux partant en évacuation sanitaire : tel est l’objectif de la future conciergerie administrative d’Onco Guyane. L’Agence régionale de santé a demandé au dispositif spécifique régional en cancérologie (DSRC) de porter ce projet.
Une assistante sociale et une secrétaire médicale vont rejoindre Onco Guyane d’ici à la fin du mois. « Elles auront pour mission d’accompagner les patients et les aidants dans leurs démarches administratives, y compris pour le volet évasan adultes et enfants, précise Cora Charles, directrice coordinatrice du DSRC.
« Dans un premier temps, elles rencontreront les services pour voir comment ils fonctionnent et comment nous pourrons les aider. Il ne s’agit pas de chambouler leur organisation, mais de voir comment nous pouvons les compléter là où ils ont besoin », détaille Cora Charles. Cette mission pourra donc couvrir la vérification des droits des patients, le recensement des établissements et des structures pouvant accueillir, héberger, accompagner les patients de Guyane lors de leurs évacuations sanitaires.
Une mission d’expertise sur la recherche, début mai
Développer la recherche en cancérologie en vue de son universitarisation faisait partie des recommandations des Pr Gilles Calais et Stéphane Culine sur le développement de la cancérologie en Guyane (lire la Lettre pro du 3 mars 2023). « Les thématiques de recherche peuvent être intéressantes, qu’il s’agisse de connaître les agents infectieux, d’aspects génétiques ou de caractéristiques socioculturelles », détaillait le Pr Calais.
Une mission d'expertise va être menée en Guyane dans le cadre du déploiement de la recherche en oncologie sur le territoire. Neuf experts du Groupement interrégional de recherche clinique et innovation sud-ouest – Outre-mer (Girci Soho) viendront du 5 au 9 mai. Ils s’entretiendront avec les acteurs hospitaliers du parcours de soins en cancérologie et voir les structures et ressources en place, en vue de fournir une feuille de route pour la réalisation des activités de recherche en oncologie en Guyane. Une restitution aura lieu le 9 mai, à l’issue de leurs travaux.
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