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Requiem pour un adjudant
par Michel Redon
Substitut du procureur de la République en Guyane jusqu'en janvier 2005
et notamment chargé des opérations Anaconda


Quelque part en Guyane, sur la Mana à Saut-Sabbat, un coin que je connais bien, un adjudant de la gendarmerie nationale est mort noyé après avoir été précipité à l’eau par l’homme qu’il venait d’arrêter… un gendarme, père de famille, arrivé en Guyane depuis peu, quelques mois à peine que j’eus moi-même quitté ce département si lointain de la France d’Amérique du Sud.

Un homme que je ne connaissais pas. Il était en opération de police judiciaire, comme nous en ordonnons chaque jour, en lutte contre l’orpaillage clandestin qui détruit et ruine cette partie de la forêt amazonienne dont la République a la charge. A peine un article d’un correspondant local dans un grand quotidien du soir, et pratiquement rien d’autre… Pas de une dans les journaux télévisés, rien dans la plupart des autres quotidiens français, ni de déclaration officielle. Il était pourtant en service. Depuis trois jours je scrute la presse sur le net : rien. Une mort sans importance, inaperçue. Je reçois quelques messages, on sait mon attachement à la Guyane, la nouvelle court de mail en mail et tous me disent leur solidarité et leur colère, voire leur écoeurement.

On venait il y a peu de métropole voir les opérations Anaconda et nos gendarmes sur le terrain dans la forêt vierge et la boue, tenter d’éradiquer l’orpaillage illégal, la prostitution et les règlements de comptes. Il y avait souvent avec eux le substitut du procureur de Cayenne que j’étais jusqu’il y a quelques mois. Je savais pour les avoir partagés, que ces moments d’action étaient parfois placés sous le signe du risque maximum. Pirogues de gendarmerie éperonnées, tirs sur notre hélicoptère, menaces de mort… Ils faisaient malgré tout leur boulot, parce que c’était leur devoir et qu’ils croyaient que c’était pour le bien de la justice dans un pays qu’ils aimaient. D’un pays et d’un peuple que nous aimons même après les avoir quittés. Rien de ce qui est guyanais ne peut plus nous être indifférent. Et surtout pas la mort injuste d’un combattant de la loi.
L’Anaconda est en deuil.

Michel REDON

Janvier 2006


N.d.E. Michel Redon est également l'auteur de deux romans parus aux éditions Ibis Rouge :
Le pensionnaire du grand collège ( sur le bagne)
La saison de l'Anaconda (qui raconte l'orpaillage illégal)


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