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Jodla 15/10/07
Droits des peuples autochtones : tout reste à faire

Une mise au point après la signature de la
Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples autochtones
Par Alexis Tiouka

Ainsi qu’il avait été signalé il y a un mois très exactement dans Blada, l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté au terme de plus de vingt ans de négociations la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples autochtones. Je souhaiterais aujourd’hui en dire un peu plus à ce sujet, notamment concernant la position de la France, mais aussi celle de nos voisins, le Brésil, le Surinam et le Guyana.

Pour rappel, le 13 septembre 2007 l’Assemblée générale a adopté cette Déclaration, le premier instrument universel à affirmer le droit de ces peuples à jouir pleinement de l’ensemble des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de ne faire l’objet d’aucune discrimination fondée sur leur origine ou leur identité autochtone. Elle a été adoptée par 143 voix pour, 4 contre (Australie, Canada, Etats-Unis et Nouvelle-Zélande) et 11 abstentions (Colombie, Azebaïdjan, Bangladesh, Géorgie, Burundi, Fédération de Russie, Samoa, Nigéria, Ukraine, Bhoutan et Kenya). Du point de vue de son contenu, au-delà de la reconnaissance des droits culturels des Peuples autochtones, la Déclaration affirme plus particulièrement le droit à l’auto-détermination . En vertu de ce droit ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel. Le texte déclare ainsi que les Peuples autochtones ont le droit d’être autonomes et de s’administrer eux-mêmes pour tout ce qui touche à leurs affaires intérieures et locales, ainsi que de disposer des moyens de financer leurs activités autonomes. Les Peuples autochtones ont donc le droit de renforcer et de maintenir leurs institutions politiques, juridiques, économiques, sociales et distinctes, tout en conservant le droit, si tel est leur choix, de participer pleinement à la vie politique, économique et culturelle de l’Etat. Enfin, une importance particulière est accordée dans la Déclaration aux droits des Peuples autochtones sur leurs terres et ressources ancestrales. Les Etats devant accorder une reconnaissance et une protection juridique à ces terres, territoires et ressources. Les Peuples autochtones ont de plus le droit à la réparation et, sauf s’ils en décident autrement, l’indemnisation se fait sous forme de terres, de territoires et de ressources équivalents . Enfin, parmi les autres droits cités (non exhaustif), les Peuples autochtones ont le droit de pratiquer leurs traditions, coutumes et rites religieux et spirituels ; à revivifier, utiliser, développer et transmettre aux générations futures leur histoire, leur langue, leurs traditions orales, leur système d’écriture et leur littérature. Ils ont le droit d’établir et de contrôler leurs propres systèmes scolaires.

Quoiqu’il en soit, toutes les délégations ayant adopté le texte ont spécifié que l’instrument était juridiquement non contraignant et que ses dispositions devaient être examinées à la lumière de la législation de chaque pays. En effet, rien dans le texte ne pourra constituer, selon les délégations, un encouragement à porter atteinte à l’intégrité et à la souveraineté territoriales des Etats.

Justification des votes (Brésil, Guyana, Suriname)
Le représentant du Brésil a déclaré que le texte adopté par le Conseil des droits de l’homme n’avait pas besoin d’être révisé. Cependant, il a félicité les Peuples autochtones pour les efforts qu’ils ont déployés pour l’améliorer. Il a rappelé que son pays était multiculturel et a salué l’influence des Peuples autochtones dans le rayonnement national et international de la culture brésilienne. Il s’est dit certain que cette Déclaration jouerait un rôle important pour la mise en valeur et l’exercice des droits des Peuples autochtones.

Le représentant du Guyana s’est félicité de l’adoption de la Déclaration, qui permettra de mieux faire respecter les droits des Peuples autochtones. Elle représente une étape historique, bien qu’elle ne soit pas contraignante du point de vue juridique. Conscients que certaines dispositions sont ambiguës ou peuvent prêter à des interprétations au regard des lois du Guyana, il a déclaré que son gouvernement s’était engagé à renforcer au niveau national le respect des droits des Peuples autochtones. La modernisation d’un texte de loi consacré aux droits des Amérindiens est d’ailleurs actuellement à l’étude par la Législature au Guyana.

Le représentant du Suriname s’est félicité de l’adoption de la Déclaration, compte tenu du fait que les Peuples autochtones constituent une composante importante de la population surinamienne. Cependant l’octroi de droits spéciaux aux Autochtones pourrait entrer en contradiction avec les dispositions du droit constitutionnel du Suriname, notamment celles qui portent sur le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du pays.

Le représentant de la France s’est félicité de l’adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples autochtones. Il a rappelé que son gouvernement avait soutenu l’ensemble des engagements pris au niveau multilatéral en matière de promotion et de protection des droits des Autochtones. En vertu du principe d’indivisibilité de la République, il a cependant souligné que les droits collectifs ne peuvent prévaloir sur les droits individuels. Le représentant a affirmé en conclusion l’attachement de sa délégation aux normes internationales des droits de l’homme, que cette Déclaration ne fait que renforcer.

Je ferai, pour conclure, mienne la déclaration de Victoria Tauli-Corpuz, Présidente de l’Instance permanente sur les questions autochtones : « ce jour restera dans nos mémoires comme celui qui a vu se produire un progrès spectaculaire dans la longue lutte que nos peuples mènent pour la reconnaissance des droits spécifiques qui leur reviennent en tant que peuples et cultures distincts. […]. Nous lançons un appel aux gouvernements, au système de l’ONU, aux Peuples autochtones et à la société civile pour qu’ils se montrent à la hauteur de la tâche historique qui nous attend et fassent de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des Peuples autochtones un document vivant pour l’avenir de l’humanité. »

Toutefois, tout est encore à faire, en témoignent les déclarations du Suriname et de la France (mais aussi de bien d’autres). Les Etats doivent aujourd’hui s’engager dans la voie d’une réflexion de fond sur leur système juridique au regard de la question autochtone.

Alexis TIOUKA
Octobre 2007

1. L’Australie a spécifié que c’est ce droit qui l’a conduit à refuser d’adopter cette Déclaration.
2. C’est ce point qui a conduit le Canada et la Nouvelle-Zélande à ne pas adopter le document.

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