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Jodla 29/01/10
L’interview de FF : Barrages des transporteurs
Le préfet : '' Occupons nous des camionneurs et après on verra… ''

Daniel Ferey est un lève-tôt ces jours-ci. Jeudi matin, c’est RFO qui le réveillait « à 4 heures du matin » raconte-t-il « et j’ai accepté de répondre en direct dans leur journal de 7 heures ». Ce vendredi « je me suis de nouveau levé à 4 heures » poursuit-il. Conflit oblige. Faisant quelque peu attendre « un expert venu de Paris notamment sur la question de l’essence », il m’a accordé un entretien ce matin. Il révèle avoir obtenu des transporteurs que les barrages deviennent filtrants la nuit de jeudi à vendredi. Peu avant 8 heures, c’était encore le cas au barrage de la Crique Fouillée. Je l’ai constaté sur place.

Frédéric Farine : Monsieur le Préfet, vous avez eu une longue réunion avec les transporteurs jeudi, or ce vendredi, les barrages sont maintenus. Quels sont les points bloquants ?

Daniel Ferey : Il n’y a pas de point bloquant. Nous sommes restés pendant des heures à discuter. Hier soir, on avait réussi à tout régler. Simplement, ce sont les leaders qui n’ont pas su convaincre leur base et n’ont pas été suivis. On se revoit ce matin (l’entretien avec le préfet a eu lieu vers 8 heures, la réunion devait débuter à 9h30, ndlr). J’ai tout de même obtenu que cette nuit (de jeudi à vendredi, ndlr), il y ait des barrages filtrants. J’avais dit qu’il y aurait des contraventions pour « stationnements dangereux » ou « entrave à la libre circulation sur la voie publique » pour tous ceux qui continueraient à complètement bloquer cette nuit. Ils ont laissé passer les véhicules.

Un transporteur :
« ça bloque au niveau des
charges sociales et fiscales »

Peu avant 8 heures ce matin, crique Fouillée, la « deux fois deux-voies » est très peu fréquentée. J’arrive de Matoury. Une vingtaine de voitures sont garées avant le barrage… filtrant. Les voitures passent, au compte-gouttes. La file de véhicules, attendant de franchir le barrage, en direction de Cayenne, n’excède pas une dizaine de véhicules. Des personnes, habillées comme un dimanche, passent le barrage à pied. On me désigne un porte parole des transporteurs. Je m’approche et me présente « Pas de problème pour répondre aux questions » répond mon interlocuteur. Il s’appelle Sylvio Pied, il est le frère de Joël, le secrétaire général de Walwari (éventail en langue amérindienne). Pour ce transporteur, le point de blocage dans ce conflit ne serait « pas l’indemnisation » mais se situerait, selon lui, « au niveau des charges fiscales et sociales de décembre 2009 et du premier trimestre 2010 ». Cette période correspond peu ou prou à la fermeture déjà annoncée du pont du Larivot. La préfecture ayant pronostiqué une réouverture du pont à la circulation vers le 3 avril. Si le préfet propose un moratoire pour ces charges sociales et fiscales, Sylvio Pied indique, pour sa part : « nous aurions souhaité qu’elles soient effacées sur la période de fermeture du pont puisqu’on devra les payer alors qu’on n’a pas travaillé ». Au sujet des barrages devenus filtrants, mon interlocuteur ne livre pas une explication en rapport avec la menace de contraventions du préfet. « Nous sommes un peu plus cools avec les usagers parce qu’on est quand même humains » déclare M. Pied. Et d’ajouter : « les gens sont eux aussi concernés par la fermeture du pont du Larivot. On les comprend, on laisse passer, on fait un petit filtrage. Depuis la fin de la réunion jeudi soir, les barrages sont comme ça. Mais à partir de 8 heures, on compte sévir et bloquer un peu plus durement » ajoutait-il ce matin. Mince, une demi-heure plus tard, après m’être entretenu avec le préfet je voulais poser cette nouvelle question à M. Pied : « Est-il exact qu’aucun transporteur n’avait encore, tôt ce matin, déposé le moindre élément justifiant une demande d’indemnisation ? » Mon interlocuteur est alors sur messagerie. Je laisse un message sur son portable dont il m’a donné le numéro à la fin de notre entretien. J’attends…

FF

FF : Je l’ai constaté encore ce matin, peu avant 8 heures, au rond point de la Crique Fouillée, les véhicules passaient au compte-gouttes.

DF : C’est ça, cette nuit ils ont joué le jeu donc ils n’ont pas eu de contravention pour l’instant. Mais tout a été relevé. Tout est prêt à être mis en place. Je serai intransigeant là-dessus.

FF : Au rond point de la crique Fouillée, j’ai effectivement remarqué des véhicules de gendarmerie en observation.

DF : Ils ont joué le jeu donc à partir de ce moment, en filtrant, c’est tolérable. Le problème, c’est que les transporteurs n’arrivent pas vraiment à se mettre d’accord, à remplir les formulaires dont ils ont besoin pour se faire indemniser. Il ne sera pas question qu’il y ait des indemnisations comme ça en décrétant : « pour moi c’est 5000 euros par mois par camion ». Ca n’a aucun sens. Il faut que cela soit étayé au préalable par le bilan des entreprises et par jour de travail. Les jours où ils bloquent les routes, on ne va pas les indemniser ces jours là quand même ! Si tant est qu’il y aura des indemnisations, ce sera quelque chose de beaucoup plus fin. Voilà où on en est. Hier soir, à un moment donné, ils voulaient que les cotisations sociales ne fassent pas simplement l’objet d’un moratoire mais soient purement et simplement supprimées.

FF : C’est exactement ce que m’a dit un transporteur ce matin au rond point barré de la Crique Fouillée (voir par ailleurs)

DF : Ca c’est totalement impossible puisque cela ressort du domaine législatif. On y est arrivé après une année de discussion au Parlement pour les cotisations sociales dans le cadre des problèmes qu’il y a eu aux Antilles en particulier. Mais il a fallu une loi pour cela et qu’un décret sorte ! Donc, ce point n’est pas envisageable, ça ne sert strictement à rien, c’est une impasse. Ils ont bien compris, ils n’ont pas insisté (le son de cloche est différent chez le transporteur interviewé par ailleurs, ndlr). Leurs représentants ont alors demandé : « Nos gars voudraient savoir à quel date, ils peuvent percevoir le chômage partiel, les prêts à taux zéro… ». Hier soir finalement, je leur ai dit : on se revoit vendredi matin. On a aussi rendez-vous mardi pour traiter de tout cela. Il n’y a pas de raison que cela ne se règle pas, sauf que les leaders n’ont pas été suivis par leur base. Alors à la réunion de ce matin, je leur ai proposé d’emmener plus largement les gens qui souhaitent venir pour qu’effectivement on puisse apporter l’information à tout le monde puisque les leaders des transporteurs, eux-mêmes, éprouvent des difficultés à la faire passer. Il faut souligner qu’à l’heure où je vous parle (l’interview a eu lieu vers 8 heures vendredi, ndlr) pour l’indemnisation, je n’ai, en ma possession, aucun des éléments demandés pour justifier des pertes subies par les entreprises. Même pas un seul bout de papier !

FF : Hormis les deux chefs d’entreprises qui avaient déposé un dossier, disiez-vous, à la date d’hier jeudi…

DF : Ce n’est pas la même chose, les deux dossiers dont je vous ai parlé hier, c’était pour le chômage partiel où c’est rôdé : il nous faudra deux à trois jours, c’est tout, pour instruire un dossier. Là, on parle d’indemnisation des pertes du chiffre d’affaires, c’est autre chose, c’est plus global et beaucoup plus exceptionnel. Ca n’arrive quasiment jamais. Et je ne me vois pas aller à Bercy demander tant d’argent si c’est basé sur rien. Le bilan des entreprises au 31 décembre 2009, il a été fait, il suffit simplement de comparer avec l’année précédente ou par rapport au mois de décembre 2008.

FF : Avez-vous une petite ouverture de Bercy au cas où les transporteurs fourniraient des preuves de la baisse de leur chiffre d’affaires ?

DF : (Hésitant…) Pour l’instant, écoutez, tout est possible, les comptes sont à examiner. Il faut que ça commence par là mais pour l’instant je n’ai toujours rien. Je vais mettre des gens de la DDE pour les aider à regarder les bilans. Mais si les éléments ne parviennent pas, pour ma part, je n’ai pas un chéquier de Paris qui me permettrait de faire un chèque comme ça… Peut-être que ça viendra si nous parvenons à un accord. Mais pour l’instant, c’est de l’argent public qui n’est pas distribué comme ça à celui qui crie le plus fort. Et qui n’est peut-être pas celui qui a le plus mal d’ailleurs…

FF : Hier soir, il a été fait état, sur RFO, par le journaliste Laurent Marot, d’une demande d’indemnisation des transporteurs (pour chaque mois de fermeture du pont) à hauteur de 5000 euros mensuels pour un transporteur possédant un seul camion, à hauteur de 10 000 euros mensuels pour une entreprise possédant de 2 à 5 camions. Vous, en l’état, vous voudriez que ces chiffres soient étayés ou affinés…

DF : Oui, parce que ça ne veut strictement rien dire. Il y en a qui ne passent pas du tout par le pont du Larivot, il y en a qui y passent continuellement. Il faut quand même qu’on fasse une évaluation. Il faut pouvoir déterminer une enveloppe globale.

FF : En écoutant des témoignages dans la rue ou, par exemple l’émission radio Parol Kontré, hier soir, sur RFO, on se rend compte que les sentiments des citoyens guyanais quant à ce mouvement, sont très partagés. Vous l’évoquiez d’ailleurs dès hier…

DF : En tout cas, en demandant des barrages filtrants cette nuit, j’ai voulu soulager la pression et cela ne leur a pas fait de mal. Parce qu’à mon avis, si je laisse les gens être bloqués jour et nuit, il est même possible que l’opinion soit moins partagée et qu’elle se révolte totalement. J’essaye de soulager les choses mais il faudra bien que cela se règle…

FF : Autre chose : hier au sujet de l’association « des sinistrés du Larivot », vous me disiez qu’elle n’était pas très représentative, selon vous. Or, au moins l’un de ses membres a assisté à votre réunion avec les transporteurs hier…

DF : C’est ce que j’ai appris en fin de réunion. Effectivement, il était là et j’ai discuté avec lui à la fin de cette réunion. Il a voulu mélanger un peu ses propres revendications locales qui concernaient la traversée, l’organisation des bus… ce qui n’était pas le sujet des camionneurs. Les camionneurs devaient partir (à la Chambre de commerce, ndlr) je leur ai dit : « écoutez, allez-y » et je suis resté à discuter avec cette personne

FF : Un représentant de cette association a lancé le chiffre d’une indemnisation de 3 000 euros par personne…

DF : (Il coupe) Ca ne se base sur rien du tout. Aujourd’hui, les gens qui habitent à Soula et à Macouria sont 5 666, vous pouvez les appeler et leur demander : ils font du bénéfice ! Ils nous le disent : « nous faisons des bénéfices parce qu’avant nous prenions notre voiture et aujourd’hui, nous avons le bus et le bateau gratuits ». Comment voulez-vous faire état d’un dédommagement ? Ca n’a pas de sens. Certes, il y a ceux qui passent par le CD5 (la route départementale qui contourne le pont et passe par Montsinéry,ndlr) mais c’est comme tous les jours en métropole quand vous avez des chantiers qui imposent parfois des détours pendant plusieurs mois. Le problème des camions est différent : ils ne peuvent pas passer par le CD5, ils n’ont pas d’autre solution que de passer par la barge à cause de leur tonnage. Pour le reste, c’est un choix. On le déduit sur sa feuille d’impôt. Et je rappelle que la hausse de 5 centimes sur le carburant, qui a été appliquée aux Antilles, ne l’a pas été en Guyane. C’est le gouvernement qui prend cela en charge. On voit mal comment expliquer à Matignon que, non seulement, on n’a pas appliqué l’augmentation mais qu’en plus il faudrait une indemnisation…

FF : Sauf que si l’on compare à la métropole, monsieur le préfet, là-bas, les chantiers ne doivent pas imposer très souvent aux usagers un détour de 50 kilomètres voire plus…

DF : Je peux parfaitement vous donner des exemples comme celui du Tunnel du Mont Blanc, lorsqu’il a brûlé, qui a provoqué des déviations certainement plus importantes. Cinquante kilomètres, ce n’est tout de même pas…. En métropole, il arrive qu’une autoroute soit coupée. Et perdre une demi-heure à trois quarts d’heure, cela vous arrive tous les jours quand vous prenez la voiture pour aller à Paris.

FF : Effectivement…

DF : (Il recoupe) Il ne faut pas tout mélanger car si l’on demande ça, on n’aura rien pour personne. Procédons par ordre, commençons par les camionneurs. Ensuite, je suis prêt à examiner les revendications de tous, pas forcément financières, mais des revendications visant à améliorer les choses. Mais, je ne veux pas qu’une demande inconsidérée nous bloque totalement la situation. Alors, occupons-nous des camionneurs et après on verra…
 

Propos recueillis par Frédéric Farine

29 janvier 2010
 

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